La prière kabbalistique avant l’étude

La prière kabbalistique par Jacobus Swart.

לשם יחוד קדשא בריך הוא ושכינתה בדחילו ורחיחד שם יײה בו וײה ביחודא שלים בשם כל ישראל

Le texte ici présenté est la traduction française d’un article de Jacobus Swart portant sur la prière kabbalistique à réciter avant toute lecture ou toute étude.

La prière kabbalistique
La prière kabbalistique par Jacobus Swart

Dans la tradition du Judaïsme et de la Kabbale existe une prière, ou « bénédiction », récitée avant le début de toute étude des textes sacrés. La prière usuelle qui est habituellement récitée avant l’étude de la Torah est la suivante :

« Baruch Atah Adonai Eloheinu, Melech ha-Olam asher kidshanu b’mitzvotav v’tzivanu la’asok b’divrei Torah ».

Que l’on prononce « bah rouch (« ch » dur comme en allemand), ah-tah ah-doh-naï èl-oh-hay-nou, me-lech hah-oh-lahm ah-chèr kid-shad-nou b’mits-vo-tahv v’tsi-vah-nou lah-ah-sokh b’di-vré Toh-rah. Et que l’on traduit par : « Bénis sois-Tu, Seigneur notre Dieu, Roi de l’Univers, Qui nous as sanctifiés par Tes Commandements et Qui nous as commandé au sujet des mots de la Torah ».

La bénédiction kabbalistique est dite avant l’étude des textes sacrés et elle est quelque peu différente:

« l’Shem Yichud Kudshah, B’rich Hu u’Sh’chintei b’D’chilu u’Rechimu l’Yached shem Y »H b’ V »H b’Yichudah Sh’lim b’Shem Kol Yisra’el. » (1)

Que l’on traduit par : « Pour l’Amour de l’Unité du Saint, béni soit-Il, et de Sa Shekhinah, dans la crainte et l’amour, dans l’amour et la crainte, afin d’unir le Nom Yod Hé avec Vav Hé en une unité parfaite au nom de tout Israël. »

La prononciation de cette prière est bien plus difficile. Des consonnes sont vocalisées conjointement et cela peut se révéler très difficile à ceux qui ne sont pas familiers avec les spécificités de la langue hébraïque. Ainsi, je vais tenter d’expliquer ce qui se peut afin d’éclaircir la vocalisation de cette prière.

Chaque fois que vous verrez l’ ou b’ ou v’ dans les translittérations, cela signifie que la lettre doit se prononcer individuellement avant de dire les autres lettres du mot. Cela ne signifie pas que l’on doive dire « Bi » lorsque l’on lit « b’ » mais simplement le son de la lettre dont il est question. À cause des difficultés à ce que l’on prononce correctement l’hébreu, nous trouvons parfois des translittérations « le-shem » pour « l’shem » ou « bi-Yichudah » pour « b’Yichoudah », et ainsi de suite. Le problème c’est que souvent « le-shem » est lu par les non-juifs « ler-shem » ou même « lee-shem ». La manière la plus facile afin de comprendre la prononciation correcte de « l’ » est de penser à la manière dont les jeunes enfants prononcent les lettres « b » ou « v » tandis qu’ils apprennent à épeler et à lire chaque lettre d’un mot. Ils ne disent pas « bé » ou « vé » mais plutôt « bu » ou « vu ». À présent, appliquez ceci à toutes les lettres utilisées de cette manière en hébreu et vous connaîtrez ainsi exactement comme « l’ », « b’ » et « v’ » sont prononcés en hébreu.

Les difficultés de prononciation exposées dans le paragraphe précédent sont certainement concentrées dans les mots « Sh’chinteï » et « b’D’chilu ». Ici, nous avons un ensemble assez complexe de consonnes qui sont prononcées successivement sans voyelles. Plusieurs termes kabbalistiques comprennent une succession de telles lettres, et ils sont souvent prononcés de curieuses manières par ceux qui ne parlent pas hébreu. Prenez, par exemple, le mot « Sephiroth » ou « Shekhinah », j’ai déjà entendu ces deux termes prononcés « Séfirot », « Sèfiyroth » … alors que le mot est en réalité « S’firot » et sa prononciation correcte est « Sfi-rot » avec l’accent sur la dernière syllabe. Vous devez prononcer le « s » et le « f » ensemble comme dans le mot « sphinx ». La seconde syllabe accentuée du mot est prononcée comme le mot français « rote », ainsi le mot entier se prononce « S’Fi-Rote ».

La prononciation de la translittération du mot « Shekhinah », se référant à la partie féminine de la Divinité, est encore pire. À nouveau, j’ai déjà entendu des « Shikinah » et diverses autres prononciations assez étranges. La prononciation correcte se fait en combinant les sons des lettres « Sh » (prononcé comme le « ch » dans « chute ») et « Ch » (guttural comme la jota espagnole ou le « ch » allemand). Ainsi, la prononciation correcte du mot « Sh’chinah » est Shchi-NaH, l’accent étant à nouveau sur la dernière syllabe.

En comprenant ce qui vient d’être dit, il devrait maintenant plus facile de prononcer les mots ardus de cette bénédiction kabbalistique. Prononciation qui donnerait quelque chose comme : « Luh-SheM Yi-ChouD KouD-ShaH, BriCh Hou ou’ShChin-teï BuhD-Chi-Lou Ou-Re-Chi-Mou Luh-Ya-CheD SheM Y »H [prononcez les lettres « Yod-Hé »] buh V »H [prononcez les lettres « Vav-Hé »] Buh-Yi-Chou-DaH Shuh-lim Buh-SheM KoL YiS-Rah-EL ».

Je suis sûr que vous avez remarqué (2) que les lettres Yod Hé (יה) et Vau Hé (וה) dans cette bénédiction kabbalistique sont une référence explicite au Shem haMephorash ou Nom Ineffable de Dieu, יהוה, que la Kabbale interprète de diverses manières, par exemple en référence aux Sephiroth reliées aux Partzufim (Contenances divines) du Père, de la Mère, du Fils et de la Fille. Le concept des Visages Divins (Partzufim) a été discuté de manière étendue dans le système de la Kabbale lourianique. En fait, ‘Haïm Vital nous dit que le grand Ari (Isaac Louria) lui-même enseigna à ses disciples à réciter cette prière avant toute Mitzvah ou observation religieuse des commandements : « je fais cela afin d’unir le Nom du Saint, béni soit-Il (mâle), et de Sa Présence Divine (femelle), avec révérence et amour et avec amour et révérence, au Nom d’Israël ». Vital ajoute « On doit ensuite méditer sur le fait que l’on combine les lettres YH (יה) qui représentent l’amour et la révérence avec les lettres VH (וה) qui représentent le Saint, béni soit-Il (Zeïr Anpin, le Mâle) et Sa Divine Présence (la Shekhinah, la Noukvah, la Femelle) ».

Nous trouvons une description similaire de l’union de Dieu et de Sa Shekhinah dans les traditions qui dérivent du Baal Shem Tov. Il enseignait également à ses disciples à réciter une prière spéciale lors de l’accomplissement de toute mitzvah : « Pour l’amour de l’union du Saint, béni soit-Il, et de Sa Shekhinah, dans la crainte et dans l’amour, dans l’amour et dans la crainte (en référence à Hessed et à Guebourah), afin d’unir le Nom YH et VH au moyen de Celui qui est caché et enclos dans le Nom de tout Israël ».

Fraternellement,

La prière kabbalistique par Jacobus. Traduction par Spartakus FreeMann, 2007.

Notes personnelles :

(1) Lors du jour de Shabbat, on allume traditionnellement une paire de bougies que les mystiques interprètent comme des représentations des qualités féminines et masculines qui résident en chaque être humain, dans le Cosmos et en Dieu Lui-même. Certains hassidim (voir le Sha’arei Tzion du Rabbi Nathan Nata ben Moshe et les écrits du Rabbi Nachman de Braslav) et kabbalistes récitent donc le « L’Shem Yichud Kodesh » afin de signifier par cet acte l’intégration du féminin et du masculin.

Les « Zettil Hakattan » (Petites Lettres) du rebbe Elimelech de Lizensk conseille : « Peu importe ce que l’on fait, que ce soit l’étude de la Torah, dire la prière ou accomplir une mitzvah, l’on doit prendre l’habitude de dire le L’Shem Yichud ».

Dans le ArtScroll Sidur (page 5), cette prière est conseillée avant de mettre les Tefiline ainsi que pour le comptage de l’Omer (p. 282).

Il est à noter la similarité de cette formule avec une autre formule plus ancienne qui commence par « Je te bénis au Nom de YHVH et de Sa Asherah ». Le Zohar (I, 49a) nous enseigne qu’Asherah est un des noms de la Shekhinah.

(2) On remarquera que cette prière comprend le Nom Tétragramme de Dieu que l’on ne peut prononcer. Afin de contourner cet interdit, les kabbalistes conseillent soit de prononcer « ee » entre chaque lettre (Arizal), soit de prononcer « Hé » en « Ké » (Ben Ish ‘Haï, in Od Yossef ‘Haï), soit, enfin, de prononcer le mot « Oth » (mot) avant de dire le nom de chaque lettre (« Oth Yod », « Oth Vav »… voir Halichoth Olam Helek, page 49).

« [Par la Leshem Yihud] on reconnecte la parole, qui est un reflet de la Shekhinah avec Hashem. Ceci explique également le verset « Et la gloire de Hashem sera révélée, et toute chair verra que la bouche de Hashem a parlé ». Lorsque le monde est unifié avec Hashem, qui est l’unification du Saint béni soit-Il avec Sa Shekhinah, alors « la gloire d’Hashem sera révélée ». « Gloire » se réfère à la Shekhinah, comme nous le savons. Cela signifie que l’illumination de la Shekhinah (qui est un reflet de Malkhuth) sera révélée et étendue, car à présent sa lumière est diminuée et sa force est affaiblie, comme il est écrit dans le Saint Zohar, que la Shekhinah crie (dans le Cantique des Cantiques) « nourris-moi… car je suis malade d’amour ». C’est l’amour pour Israël, parmi qui Elle réside, même dans son impureté, et c’est l’exil de la Shekhinah. Mais comme nous l’avons dit, au travers de la correction du partzuf de Malkhuth et de l’unification avec Hashem avec la parole, la lumière du partzuf de Malkhuth est révélée et étendue » (Nachman de Braslav, Likutei Moharan, Kama 78).

Suite au commentaire de Gilen, nous plaçons ici la version du Arizal de la prière avant l’étude, prière qui contient le passage dont nous discutons ici.

Prière avant l’étude de Arizal :

Maître des Mondes (Atika Kadisha) & Seigneur des Seigneurs (Arikh Anpin), Père de la Miséricorde (Abba Supernel) & Miséricordieux (Imma Supernelle), nous Te remercions Adonaï notre D’ieu (Mochin Abba & Imma), & D’ieu (Hokhmah, Binah, Da’ath) de nos pères (Hessed, Gevurah, Tifereth), avec révérences et prosternations, que nous approchions afin de T’adorer par un saint culte. Tu nous as donné un part de Ta Sainte & Pure Torah. Que sommes-nous, que sont nos vies, que Tu nous aies accordé une telle miséricorde. Nous T’offrons donc nos supplications afin que Tu puisses nous pardonner & pardonner tous nos péchés & nos transgressions & nos iniquités. Ne permets pas à nos péchés de nous séparer de Toi. Que Ta volonté soit faite Adonaï notre D’ieu & D’ieu de nos pères, afin de diriger nos coeurs dans la crainte de Toi & dans l’amour de Toi. Que Tes oreilles prêtent attention à nos mots & ouvre nos coeurs aux secrets de Ta Torah. Puisse notre savoir être plaisant devant le Trône de Ta Gloire, comme le fut l’encens offert.

Émane sur nous la Lumière de la source de nos âmes en tous ses aspects. Puissent les étincelles de Ton culte briller de tout leur feu, celles par qui sont révélés Tes Saintes Paroles en ce monde & par leur mérite, illumine nos yeux de ce que nous apprenons comme il est dit dans la plaisant hymne d’Israël « Ouvre mes yeux afin que je puisse percevoir les merveilles de Ta Torah ».

« Puissent les mots de ma bouche & la méditation de mon coeur être acceptable devant Toi, O Seigneur, mon Roc & mon Rédempteur ». Amen selon Ta volonté.

Pour l’amour de l’Unité du Saint Un, béni soit-Il, & Sa Shekhinah YAHDVNH »Y, dans la crainte & l’amour YAHHVYH »H, dans l’amour & la crainte AYHHYVH »H, afin d’unifier le nom Y »H (Abba & Imma) avec V »H (Ze’ir Anpin & Nukvah, au travers de l’influx de Eyn Sof, qui est au-dessus d’eux & qui les unifie), en une parfaite unité au nom de tout Israël.

Afin de relever la Shekhinah de la poussière, nous désirons apprendre avec ce livre de Kabbale – qui correspond à Tifereth du Ze’ir Anpin dans le Monde de Atziluth, où réside le nom M »H, comme ce YV »D H »A VA »V H »A – afin de réaliser une Merkavah.

Que cela soit Ta volonté Adonaï notre D’ieu & D’ieu de nos pères, de purifier nos esprits & nos âmes afin qu’elles soient aptes à élever les Eaux d’En Bas par la lecture de ce livre de Kabbale.

« Puisse la faveur de notre Seigneur notre Dieu être sur nous ; que l’oeuvre de nos mains prospère, O prospère oeuvre de nos mains ! »

Beni sois-Tu Adonaï notre D’ieu & D’ieu de nos pères, pour les siècles & les siècles.

Amen !

Image by Ri Butov from Pixabay

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5 réflexions sur “La prière kabbalistique avant l’étude”

  1. En fait cette prière est beaucoup plus longue que cette simple phrase…c’est tout un paragraphe que certains récitent en différentes occasions.
    Petite remarque… ce n’est absolument pas de l’hébreu: c’est de l’araméen.
    En ce qui concerne la prononciation, je ne suis pas vraiment d’accord avec ce qui est dit ici. D’autant plus que la prononciation dépend de l’origine: un Ashkénaze ne prononce pas comme un Séfarade. Et au sein même des communautés il y a des différences: au sein des Séfarades, les juifs du Maroc ne prononcent pas comme la communauté Baghdadi par exemple. Il faudra que je vous fasse un petit article sur la prononciation :-)

  2. Salut,

    Bien sûr, la prière est plus longue – du moins une des versions que j’ai pu trouver – étant donné les différences, je n’ai pas voulu tout inclure ici. Mes références étant des siddurs anglais-hébreu j’ai parfois peur de mêler des éléments différents

    La prononciation « conseillée » ici provient d’un texte anglais que je voulais traduire pour le contexte et l’introduction à cette prière. Souvent, j’ai dû adapter ces conseils à la phonétique française.

    Les différences de prononciations entre askhénazes et sépharades (entre autres) peuvent, peut-être, amener de la confusion dans l’esprit des lecteurs francophones qui pourraient ne désirer que réciter le texte au plus juste, mais certes pas dans la perfection.

    Il serait sans doute utile que tu nous donnes une version unique à conseiller pour une diction et compréhension claire.

    Merci encore pour tes lumières.

    Spartakus

  3. Euh Gilen, si tu avais une version complète araméen-français de cette prière, pourrais-tu la placer ici ou dans les forums (ou me l’envoyer par email) ?

    Merci

  4. Je voudrais te demandé si la prière du notre père laissé par jésus a une origine juive ou kabbaliste et si il en existe une originale, car j’ai ouïe dire que l’original de cette prière fait souvent référence aux sephirots.
    Merci!

    1. Bonsoir,

      Jésus est le fils de DIEU, même si de toute manière DIEU est unique pour tous, chacun le prie de bien des manières. Sachant que Jésus Christ est en réalité Yoshua, et qu’il fut élevé dans la tradition juive depuis sa naissance, le notre père a traversé les âges en changeant forcement de contenu, et je pense a du s’adapter à la plaisance des gens. Et de toute manière la Bible vous explique son origine, alors lisez là ou allez voir qui de droit un prêtre, un rabbin, ou tout autres personnes susceptible de vous venir en aide.

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